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Histoire Géographie, Géopolitique du Monde Contemporain
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20 septembre 2017

TR 2: La crise de juillet 1914

 

CHRONOLOGIE DES FAITS

LE CONFLIT AUSTRO-SERBE

LE CONFLIT AUSTRO-RUSSE.

LE CONFLIT EUROPÉEN

LA MOTIVATION DES ÉTATS

L’AUTRICHE-HONGRIE

LA RUSSIE

L’ALLEMAGNE

LA FRANCE

L’ANGLETERRE

 

LA CRISE DE JUILLET 1914 OU LA MACHINE INFERNALE

 

    Il est impossible de comprendre son évolution sans tenir compte de l’atmosphère dans laquelle elle se développe : exaltation nationaliste, opinion publique manipulée par la presse, pression des états-majors militaires, etc… Malgré tout, cette crise aurait pu - comme les précédentes - avoir un dénouement pacifique. Depuis 1905, les crises internationales sont devenues annuelles ! Mais la course aux armements, le fanatisme des extrémismes de droite n’étaient pas un jeu. En juillet 1914, on fait la guerre pour de bon. Il est impossible aussi d'ignorer les crises antérieures dont le résultat a ébranlé la puissance autrichienne dans les Balkans et Vienne veut redresser sa situation Les guerres balkaniques 1912-1913

    Pour comprendre cette issue dramatique, il faut exposer les faits (I) et analyser les politiques nationales (II).

I. CHRONOLOGIE DES FAITS

 

    La crise se développe en trois phases : la crise austro-serbe ; la crise austro-russe ; la crise européenne.

LE CONFLIT AUSTRO-SERBE

 

    Le 28 juin 1914, à Sarajevo, est assassiné l’archiduc héritier d’Autriche-Hongrie, François-Ferdinand. Les auteurs de l’assassinat sont des citoyens bosniaques, sujets autrichiens, Tchabrinovitch et Printsip, mais serbes par la langue et le sentiment national. L’attentat a été préparé à Belgrade avec une société serbe "la Main noire".

    Vienne n’a pas la preuve d’une "complicité directe" de la Serbie mais considère que la responsabilité "indirecte" du gouvernement serbe est engagée. L’Autriche-Hongrie veut profiter du coup pour "éliminer la Serbie comme facteur politique".

    Les 5 et 6 juillet, à Potsdam, une délégation autrichienne rencontre le gouvernement allemand. Le ministre allemand déclare "qu’il ne faut pas laisser passer le moment actuel, si favorable".

    Forte de ce soutien, l’Autriche adresse à Belgrade un ultimatum, le 23 juillet à 18 heures ; que la Serbie désavoue la propagande anti-autrichienne qui se fait sur son territoire, que la Serbie dissolve toutes les sociétés secrètes qui distillent cette propagande, etc... , surtout, le point 6 de l’ultimatum exige que des fonctionnaires austro-hongrois participent, en Serbie même, "à la suppression du mouvement subversif". C’était demander à la Serbie d’abdiquer sa souveraineté, c’était rendre l’ultimatum inacceptable.

    Le 25 juillet, la Serbie déclare tout accepter sauf le "point 6". Ce même jour, Vienne rompt ses relations diplomatiques avec la Serbie, décrète une mobilisation - restreinte aux corps d’armée qui doivent entrer en ligne contre la Serbie - ; de son côté, la Serbie décrète elle aussi la mobilisation.

LE CONFLIT AUSTRO-RUSSE.

    Dès le 25 juillet, Petrograd -nouveau nom de Saint-Petersbourg- avait fait savoir qu’il ne laissera pas l’Autriche-Hongrie "écraser la Serbie".

    L’Angleterre propose une conférence internationale qui est refusée par l’Allemagne (27 juillet). Pour stopper ces manœuvres diplomatiques, le vieil empereur François-Joseph 1er signe la déclaration de guerre à la Serbie le 28 juillet. Ainsi que l’écrit, Bérenger (Sorbonne), spécialiste des Habsbourg, "la décision personnelle de François-Joseph joua (…) un rôle capital dans le déclenchement de la guerre". La Russie riposte, le 29, par une mobilisation partielle contre l’Autriche mais se déclare prête à y renoncer si Vienne modifie le point 6.

    Une nouvelle médiation anglaise est repoussée par l’Autriche à qui le chef d’état-major allemand von Moltke a promis l’appui "sans réserve" si la Russie entre en guerre.

LE CONFLIT EUROPÉEN

    Berlin fait savoir, le 29, que l’Allemagne ne tolérera pas "la continuation des mesures militaires russes". Le tsar Nicolas II réplique par la proclamation, le 30 juillet à 18h, de la mobilisation générale, y compris donc contre l’Allemagne.

    le 31, l'Angleterre demande à la France si elle respectera, en cas de guerre, la neutralité belge. La réponse est affirmative. Interrogés sur le même point, les Allemands répondent évasivement. 

    Le 31 toujours, l’Allemagne réplique à son tour par un double ultimatum. L’un adressé à la Russie afin qu’elle cesse ses mesures de mobilisation. Pas de réponse. Le second est adressé à la France : quelle attitude adoptera Paris "dans le cas d’une guerre entre l’Allemagne et la Russie ? ". Réponse : "la France agira selon ses intérêts" (sic).

    Le 1er août, l’ordre de mobilisation générale est lancé en Allemagne et en France. Déclaration de guerre de l’Allemagne à la Russie.

    Le 2 août, ultimatum allemand à la Belgique : qu’elle laisse l’armée allemande traverser son territoire. 1914 : le martyre de la Belgique

    Le 3 août, déclaration de guerre de l’Allemagne à la France.

    Le 4, violation du territoire belge par l’Allemagne garante de la neutralité belge, le Royaume-Uni de Grande-Bretagne et d’Irlande déclare la guerre à l’Allemagne.

II. LA MOTIVATION DES ÉTATS

    Relevons les principaux axes politiques de chaque État.

L’AUTRICHE-HONGRIE

    Pour cet empire multinational, les aspirations nationalistes de Slaves du sud (en langue slave yug-slaves = yougoslaves) sont une menace pour l’existence de l’empire austro-hongrois. Le succès d’un mouvement séparatiste aurait encouragé toutes les autres nationalités soumises à la double-monarchie. Autriche-Hongrie en 1914 (1ère partie) : description et construction historique  et aussi Autriche-Hongrie en 1914 (2ème partie) : nationalités & problèmes politiques. Écraser la Serbie est, pour cette dernière, une "question vitale". Vienne accepte une guerre locale en sachant très bien que cela débouchera sur une guerre générale. Mais à quoi bon attendre ? "L’équilibre des forces se déplace contre nous" dit le ministre de la Guerre autrichien. Mieux vaut que le conflit ait lieu en 1914. (Sachant que le conflit sera violent mais bref).

    Bérenger écrit sans ambages : "L’ultimatum à la Serbie était une démarche suicidaire et bien peu compréhensible chez un homme aussi prudent que François-Joseph" et plus loin "la puissance qui, objectivement, avait le moins d’intérêt à provoquer un conflit fut précisément celle qui mit le feu aux poudres". "Objectivement" est discutable (cf. l’article sur les Guerres balkaniques Les guerres balkaniques 1912-1913).

LA RUSSIE

    L’empire des tsars a un double échec à compenser : 1905 contre le Japon, 1908-1909 après l’annexion de la Bosnie-Herzégovine par l’Autriche-Hongrie. En 1914, cette affaire n’est pas absolument vitale mais sa passivité lui ferait perdre toute influence dans les Balkans. Or sa présence dans les Balkans, l’ouverture des Détroits (Bosphore et Dardanelles), sa présence en Méditerranée sont des axes fondamentaux, essentiels de la politique étrangère de la Russie. 

    Le 28 juillet, la Russie accepte la provocation autrichienne et, sous la pression de ses militaires, le tsar déclare la mobilisation générale. Elle a été la première des grandes puissances à y recourir. C’était contraire au texte du traité d’alliance franco-russe. Que dit ce texte ? (NB. c’est moi qui souligne) :

"1°) La France et la Russie, étant animées d'un égal désir de conserver la paix, et n'ayant d'autre but que de parer aux nécessités d'une guerre défensiveprovoquée par une attaque des forces de la Triple-Alliance

"Si la Russie est attaquée par l'Allemagne, ou par l'Autriche soutenue par l'Allemagne, la France emploiera toutes ses forces disponibles

"2°) Dans le cas où les forces de la Triple-alliance, ou d'une des Puissances qui en font partie, viendrait à se mobiliser, la France et la Russie, à la première annonce de l'événement, sans qu'il soit besoin d'un concert préalable, mobiliseront immédiatement et simultanément la totalité de leurs forces, et les porteront le plus près possible de leurs frontières.

    Il est clair que la Russie n’est pas attaquée, qu’elle n’a pas répondu à une mobilisation préalable de l’Autriche ou de l’Allemagne contre elle, bref, il ne s’agit pas d’une guerre défensive… La France pouvait ne pas suivre son alliée. Mais cette convention militaire secrète franco-russe de 1892 dit aussi

                        "3°) Ces forces s'engageront à fond, en toute diligence, de manière que l'Allemagne ait à lutter, la fois, à l'Est et à l'Ouest.

Laisser la Russie seule, c’eût été se retrouver seule après la défaite de la Russie…

        Quoiqu’il en soit, cette mobilisation générale des forces russes ne pouvait que provoquer la réplique allemande.

L’ALLEMAGNE

    Renouvin [1] écrit que l’Allemagne n’a pas d’intérêts directs dans les Balkans. La lecture des écrits du général von Bernhardi ne donne pas cette impression. Les Balkans vus d’Allemagne (1912) et aussi "Notre avenir" par le général**** von Bernhardi (1912), préfacé par Clemenceau (1915). Un axe russo-serbe, est-ouest, dans les Balkans couperait l’axe nord-sud du Berlin-Bagdad… La Serbie ne représente pas grand-chose pour Berlin mais elle gêne beaucoup l’Autriche et d’un point de vue Weltpolitik, mondial, l’accès au golfe persique pour les Allemands passe par les Balkans et l’empire ottoman.

    Berlin estime nécessaire de "renflouer" l’empire austro-hongrois : "nous ne pouvons pas sacrifier l’Autriche" (secrétaire d’État, Jakow). Donc soutien à un conflit local, et si la Russie élargit le conflit, Berlin est résolu à aller jusqu’au bout.

    Mais Berlin précipite la rupture en adressant son double ultimatum du 31 juillet. Elle aurait pu se contenter de faire comme la Russie, c’est-à-dire ordonner une mobilisation partielle. Mais tout ce qui est militaire en Allemagne -c’est-à-dire beaucoup de monde - est prisonnier du plan Schlieffen : il faut immédiatement attaquer la France via la Belgique, la mettre à terre en 1 mois à peine et se retourner ensuite contre la Russie dont la profondeur stratégique n’est pas la même. "L’Allemagne a pour elle la rapidité" dit Jakow. C’est pourquoi Berlin ne souhaite pas la neutralité de la France. En ce cas, l’Allemagne aurait exigé comme gage la remise des forteresses de Toul et de Verdun, autant dire que Berlin voulait la guerre…

LA FRANCE

    Paris ne veut pas ébranler l’alliance franco-russe. Lors d’une visite à Petrograd les 20-23 juillet, Poincaré -président de la République- et Viviani -président du Conseil- promettent "d’exécuter toutes les obligations de l’Alliance". Or la Russie, je l’ai déjà dit, a mobilisé la première - mais la propagande française fait croire le contraire - et a provoqué la réplique allemande que l’on sait. Mais la France tient à ce que l’Allemagne se batte sur les deux fronts, divise ses forces. L’assassinat de Jaurès -et l’acquittement de l’assassin par la justice - donnent une idée du climat politique qui régnait à Paris - comme d’ailleurs partout ailleurs - durant ses journées. 

L’ANGLETERRE

    Elle n’avait d’engagement formel avec personne. Mais elle est soucieuse de l’équilibre européen. Une Allemagne vainqueure, qui s’emparerait des colonies françaises et belges, ménagerait-elle ensuite l’Angleterre ? Le cabinet de sa majesté est très divisé. En cas de guerre franco-allemande, la Grande-Bretagne ne saurait "rester à l’écart" dit le Foreign office à l’Allemagne. Mais c’est la violation de la neutralité belge qui fait basculer l’opinion publique, l’establishment et le gouvernement de sa majesté.L'annexion de la Belgique par l'Allemagne détruirait l’équilibre européen car la "minuscule Belgique" comme disent les Allemands est, en réalité, un fief de la révolution industrielle avec son charbon et son acier wallons, ses constructions mécaniques, c'est aussi le port d’Anvers une des gateway continentales, c'est enfin un empire colonial -dont l'immense Congo- sur lequel lorgnent les impérialistes allemands depuis des lustres. 

 *

*        *

    Ces analyses valent pour l’écume des choses, là où s’expriment les choix individuels des dirigeants. C’est un niveau d’analyse nécessaire. Il laisse malheureusement de côté le niveau fondamental : celui des enjeux vitaux des différents impérialismes. A cet égard, l’étude de l’analyse du livre de von Bernhardi est indispensable. "Notre avenir" par le général**** von Bernhardi (1912), préfacé par Clemenceau (1915) L’Allemagne veut sa "place au soleil" (Chancelier Von Bülow, 1897). Son objectif est l’accès au Golfe persique et au pétrole du Moyen-Orient via sa domination sur l’empire ottoman Les Balkans vus d’Allemagne (1912) et la mainmise sur les empires belge et français. Croit-on que l’Angleterre laissera se former à ses côtés un tel mastodonte ? Clemenceau, dans sa préface à la traduction française (1915) du livre de Bernhardi montre qu’au niveau des dirigeants on avait conscience de l’extension systémique de la puissance allemande.

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